ARTHROSE RÉFRACTAIRE : COMPRENDRE LES DÉFIS ET LES OPTIONS THÉRAPEUTIQUES
Évaluer la prévalence de l’arthrose réfractaire
L’arthrose est une pathologie articulaire très fréquente et invalidante qui touche des centaines de millions de personnes dans le monde, à savoir près de 10 % de la population mondiale âgée de plus de 60 ans1. Le genou est l’articulation la plus souvent touchée ; l’arthrose du genou cause la destruction de l’intégrité du cartilage et engendre des changements pathologiques correspondants au niveau des bords de l’articulation et des os sous-chondraux. L’arthrose du genou est une affection très invalidante qui a des effets considérables sur la qualité de vie quotidienne des patients.
Si de nombreux patients sont soulagés par les traitements standards, une part importante des patients sont réfractaires à ces thérapies. Les traitements conventionnels souvent employés (injections d’acide hyaluronique [AH], corticostéroïdes, médications antidouleurs, voire approches plus invasives telles que la chirurgie) ne leur conviennent malheureusement pas, contraignant les patients souffrant d’arthrose réfractaire à subir un inconfort permanent et à rechercher d’autres alternatives2.
L’arthrose réfractaire : qu’est-ce que c’est exactement ?
L’arthrose est une affection multidimensionnelle dont le traitement peut s’avérer complexe. Toutefois, il se peut que dans certains cas, les traitements standards n’apportent pas le soulagement escompté. D’où le fait que l’on parle d’arthrose « réfractaire ».
L’arthrose réfractaire va au-delà de la définition conventionnelle de l’arthrose, et se caractérise par une absence chronique de réponse aux modalités de traitement standard. La complexité de l’arthrose réfractaire résulte d’une multitude de facteurs, dont l’hétérogénéité physiologique des patients, les comorbidités et la nature multifactorielle de l’arthrose elle-même. L’arthrose réfractaire est un cas particulier dans le continuum de cette maladie, correspondant aux cas qui résistent aux mesures thérapeutiques conventionnelles3.
Mieux comprendre
La teneur du terme « réfractaire » dans le contexte de l’arthrose varie d’une publication de rhumatologie à l’autre. Ce terme est le plus communément utilisé pour décrire des situations dans lesquelles :
- la douleur arthrosique persiste en dépit du recours à des traitements conservateurs non pharmacologiques;
- la douleur arthrosique persiste en dépit des traitements pharmacologiques couramment utilisés et recommandés;
- la douleur arthrosique persiste dans des cas avancés ayant donné lieu à un traitement chirurgical bien conduit.
Dans le débat plus large concernant l’efficacité des traitements de l’arthrose du genou, et en particulier la viscosupplémentation en AH, certains phénotypes de patients ont été identifiés comme prédicteurs potentiels de non-réponse à la viscosupplémentation en AH.
Le groupe d’experts EUROVISCO a notamment identifié certains de ces phénotypes de patients dans sa publication de 20184. Outre d’autres identifiés dans la pratique clinique, ces sujets forment donc un groupe clairement défini de patients atteints d’arthrose réfractaire.
Les complexités de l’arthrose réfractaire débouchent sur une intervention cruciale : la prothèse totale de genou (PTG). Lorsque la douleur arthrosique du genou finit par ne plus répondre à aucun traitement médical ou physique, la PTG s’impose généralement comme l’option ultime pour les patients éligibles.
Cependant, la prévalence des procédures de PTG exerce une pression croissante sur les systèmes de soins de santé. Et, plus inquiétant encore, après une PTG, qui est souvent considérée comme la dernière option thérapeutique, 10 à 20 % des patients continuent d’être aux prises avec une douleur réfractaire au genou (communication de l’OARSI1). Cela confronte tant les patients que les systèmes de soins de santé à d’importants défis.
Identifier les causes de l’arthrose réfractaire
Déterminer les causes profondes de l’arthrose réfractaire est essentiel pour améliorer l’efficacité des traitements. La recherche accorde un intérêt croissant aux mécanismes moléculaires et de nouvelles stratégies thérapeutiques voient le jour. Une recherche portant sur deux cohortes indépendantes de patients souffrant de douleur réfractaire un an après une arthroplastie totale du genou (ATG/PTG) a mis en évidence des associations métabolomiques significatives, l’une des études concluant que les patients souffrant d’arthrose réfractaire présentaient des réponses inflammatoires et oxydatives accrues, lesquelles jouent un rôle significatif dans les symptômes cliniques de l’arthrose réfractaire (la Newfoundland Osteoarthritis Study [NFOAS] et la Longitudinal Evaluation in the Arthritis Program Osteoarthritis Study [LEAP OA]1).
La physiopathologie constitue un élément central dans la différenciation de l’arthrose réfractaire de sa version non réfractaire. Il apparaît que l’arthrose réfractaire s’accompagne d’une réponse immunitaire innée accrue, avec des niveaux élevés de cytokines inflammatoires telles que IL-6, IL-8 et TNF-α. Ces cytokines exacerbent la dégradation du cartilage en favorisant les métalloprotéinases matricielles (MMP) et les aggrécanases, des enzymes qui détruisent la matrice cartilagineuse5. En outre, une augmentation du stress oxydatif était rapportée chez ces patients, mettant en évidence un potentiel cercle vicieux : l’inflammation provoque le stress oxydatif qui, à son tour, amplifie l’inflammation6.
On pense que la pathophysiologie implique une inflammation persistante de bas niveau, engendrant un cycle de dégradation du cartilage, un remodelage altéré de l’os sous-chondral et une inflammation synoviale, que les interventions standards ne parviennent pas à traiter de manière adéquate. Ce cycle interrompu contribue non seulement à la progression des lésions articulaires, mais également à la douleur et au handicap chroniques fréquemment observés chez ces patients.
Ces constats mettent en évidence les limites des modalités de traitement actuelles. Dans l’hypothèse d’un échec des traitements conventionnels, quelle est l’étape suivante de notre parcours thérapeutique pour ces patients ?